Lu sur LinkedIn (« Télétravail : les employeurs reculent », par Tiffany Blandin), le fait que le nombre de postes ouverts qui déclarent le télétravail comme forme naturelle et prévue au contrat a perdu quelques points entre avril et octobre 2022.
Une analyse de Victor Carreau (CEO @Comet) évoque la question de la hype, par laquelle il est montré que toute nouveauté technique connaît un recul après sa première montée en puissance et avant la reprise générale du mouvement.
Cela me paraît très vrai tant un nombre incroyable de tâches ou de missions ne nécessitent pas la présence obligatoire d’un agent ou d’un salarié sur son lieu de travail.
Les reproches faits au télétravail liés aux difficultés de maintenir une séparation nette entre vie privée et vie professionnelle sont cependant à entendre et il faut une sacrée discipline pour ne pas voir la vie à la maison totalement bouleversée par ces nouvelles formes de production.
Néanmoins, c’est sans doute par réaction que les entreprises ou les collectivités locales semblent stagner sur le télétravail.
À quoi sert le chef s’il ne peut plus "cheffer" ses subordonnés ? Où en est-on de l'antique rôle de subordination qui s'amoindrit en situation de télétravail et qui fait encore le délice de certains managers de collectivités locales.
J'avoue avoir été moi-même troublé par l'absence de personnes dont je pensais qu'elles devaient être embarquées dans le même bateau que la direction générale, c'est à dire être présente, comme l'officier de bord veille à la bonne navigation du navire dont il a la charge.. J'ai ainsi limité un temps le télétravail aux non-cadres, ce qui s'avère aujourd'hui être une erreur de ma part et surtout une réaction inappropriée face au sentiment d'inutilité que ressent tout manager qui n'a plus personne à manager... en présentiel.
Alors ne nous mentons pas non plus, il est plus que certain que le télétravail est aussi utilisé par certains fonctionnaires pour en faire le moins possible ou et ce n'est pas vraiment condamnable, pour s'arranger dans sa vie personnelle. J'ai ainsi l'exemple d'un cadre de direction de la FPT, qui ayant 2 jours de télétravail par semaine, avait choisi les lundis et vendredis. Et bien oui, nécessité de service fait loi...
Le risque de "dérapage" est toujours présent et les lois du service Public ou lois de Rolland augmentées doivent être l'alpha et l'omega du fonctionnaire (http://www.journal-du-droit-administratif.fr/lois-dites-de-louis-rolland/) . Mais le télétravail contribue à faire des économies d'échelle importantes en termes de gestion de locaux (s'il est anticipé), à réduire notre empreinte carbone (d'un point de vie des transports en tout cas), à améliorer l'équilibre vie professionnel et vie personnel, à contribuer à l'accélération de l'exécution de tâches répétitives mais essentielles (mandatement par exemple) et à réfléchir à une nouvelle organisation plus agile dans lequel le principe de coopération prévaut sur le principe hiérarchique dont on sait qu'il est encore extrêmement présent dans les collectivités locales.
C’est donc encore interroger son rôle de manager que de considérer l’activité hors les murs d’un agent d’une commune par exemple ; c’est aussi interroger le mode de production, les missions confiées à l’agent, les objectifs qui lui sont donnés et le contrôle de la qualité du travail et tout cela est de la responsabilité du manager.
Alors, que le télétravail recule, stagne ou ne fasse qu'effectuer deux pas en arrière pour mieux avancer, il est surtout certain que les collectivités locales ne sont pas à la pointe du mouvement. Et il est aussi certain que ce mouvement de fond les rattrapera. Il est urgent qu'elles se préparent activement à cette révolution pourtant déjà bien entamée.
Pour aller plus loin sur les Lois du service Public ou lois de Rolland, lire l'excellent extrait du livre de Philippe Raimbault, Professeur de droit à L'université de Toulouse et aujourdhui inspecteur général : https://books.openedition.org/putc/1606?lang=fr
Rémy CANUTI
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